Paru dans le Bulletin de l'AIM, n° 109, 2015
Les fondations et les fermetures de monastères
dans la confédération bénédictine[1]
Cet article a été rédigé par la direction de l’AIM sur la base d’une étude statistique du père Geraldo Gonzalez y Lima, moine de São Paolo (Brésil), collaborateur actif de l’AIM et économe de Saint-Anselme, à Rome. À cette étude ont été joints les bilans de fondations et de fermetures des ordres cisterciens. Un tel apport quantitatif appelait une tentative d’évaluation qualitative. Même si, dans ce domaine, les interprétations peuvent être variées, il était nécessaire de présenter ici quelques pistes de réflexions pour faire le point sur la situation actuelle et mieux se disposer pour l’avenir.
Comment évolue le phénomène des fondations dans la confédération bénédictine et dans les ordres cisterciens à travers le monde ? Le mouvement de fondations, initié dans les années 1960 d’une manière plus massive que dans les décennies précédentes de la fin du 19e siècle et de la première partie du 20e siècle, laisse dans les esprits une forte impression d’expansion : quelques cinq cents monastères en cinquante ans ! L’AIM a apporté son soutien à cet élan et, de ce fait, en est un bon témoin. On peut constater que dans les années qui viennent de s’écouler, des évolutions ont eu lieu dans ce domaine au sein du monde bénédictin. Il faut tenir compte aussi des nombreuses fermetures de monastères à travers le monde qui modifient la physionomie de nos familles monastiques et de leur impact au cœur des continents dans lesquelles elles sont implantées.
I. Effectifs
1. Nombre de monastères
2. Nombre de moniales et de sœurs
Année | Professes solennelles | Professes temporaires | Novices | Oblates | Total |
2000 | 14 690 | 1 209 | 560 | 147 | 16 594 |
2006 | 13 650 | 1 138 | 523 | 127 | 15 438 |
2014[2] | 12 340 | 888 | 403 | 102 | 13 733 |
3. Nombre de moines
Année | Profès solennels | Profès temporaires | Novices | Oblats | Total |
2005 | 6 769 | 850 | 372 | 127 | 8 116 |
2010 | 6 349 | 814 | 292 | 134 | 7 587 |
2015 | 6 228 | 597 | 397 | 154 | 7 376 |
Ainsi la plupart des quatre-vingt-trois congrégations féminines et masculines ont perdu des membres, certaines du tiers. Seules quelques-unes en ont gagné (13) et d’autres sont restées stables (6).
II. Fondations et fermetures dans le monde
Monastères de femmes
Dans la période 2000-2014, il y a eu 116 nouvelles fondations dont 10 entre 2010 et 2014.
Pendant ce temps-là, il y a eu 137 fermetures dont 13 entre 2010 et 2014.
Monastères d’hommes
Dans la période 2000-2014, il y a eu 54 nouvelles fondations dont seulement 3 entre 2010 et 2014.
Dans le même temps, il y a eu 34 fermetures dont 11 entre 2010 et 2014.
En cumulant les résultats pour les monastères de femmes et d’hommes
Dans la période 2000-2014, il y a eu 170 nouvelles fondations (soit une moyenne de 12 fondations par an), dont 13 entre 2010 et 2014 (soit une moyenne de 2,6 fondations par an).
On constate une chute importante de la proportion des fondations bénédictines sur les cinq dernières années.
Pour ce qui est des fermetures, il y en a eu 171 entre 2000 et 2014 (soit une moyenne de 12 fermetures par an) dont 24 entre 2010 et 2014 (soit une moyenne de presque 5 par an). Cela signifie que la proportion des fermetures s’est ralentie dans les cinq dernières années mais elle reste plus forte que celle des fondations. Les années à venir diront s’il y a là une réelle tendance.
1. Fondations et fermetures en Afrique
– Monastères de femmes : Il y a eu dans la période 2000-2014, 34 fondations dont 20 en Tanzanie, 3 au Kenya, 3 en Namibie ; 2 au Nigeria et 1 dans les pays suivants : Bénin, RDC, Rwanda, Ouganda, Tchad et Zambie. Entre 2010 et 2014, il y a eu 4 fondations : 3 en Tanzanie et 1 Nigeria alors que, entre 2000 et 2010, il y en a eu 30.
Pendant cette même période 2000-2014, il y a eu 9 fermetures de monastères : 2 en Namibie et en Afrique du Sud, 1 dans les pays suivants : Tanzanie, Kenya, Nigeria, Rwanda et Sénégal. Ces fermetures concernent la plupart du temps des maisons de mission.
– Pour les monastères d’hommes, il y a eu dans la période 2000-2014, 15 fondations dont 1 entre 2010 et 2014 en Mozambique.
Entre 2000 et 2014, il y a eu 3 fermetures de monastères d'hommes.
– Pour les monastères de femmes et d’hommes pris ensemble :
il y a eu 49 fondations entre 2000 et 2014 dont 5 entre 2010 et 2014.
Il y a eu dans la même période 12 fermetures de monastères.
Commentaire
Le phénomène de la Tanzanie mérite d’être présenté pour lui-même tellement il semble particulier parmi les pays d’Afrique :
« La Tanzanie est le pays d’Afrique où il y a le plus de bénédictins. C’est en partie dû à l’histoire de la mission dans cette région. En 1887, le Saint-Siège a confié l’évangélisation du sud du pays aux bénédictins de Saint-Ottilien. Avec les sœurs bénédictines de Tutzing, ils ont laissé une marque profonde sur la vie religieuse en ce lieu, à travers leurs propres implantations ainsi que la fondation de congrégations locales. Récemment, a été lancée également une communauté camaldule masculine.
« Actuellement, la Tanzanie compte quatre abbayes d’hommes, deux prieurés et plusieurs petites maisons ; il y a deux prieurés de sœurs bénédictines de Tutzing, un de moniales camaldules et deux congrégations locales de sœurs bénédictines qui, à elles seules, comptent plus de mille sœurs ! L’origine missionnaire de la plupart de ces établissements peut se reconnaître clairement dans les activités de ces communautés. Elles sont investies dans des écoles, des hôpitaux et des cliniques, des paroisses et des centres d’accueil pour des retraites.
« Une des quatre abbayes de Saint-Ottilien et les deux prieurés de Tutzing ont encore des supérieurs étrangers. Cependant, la plupart des responsabilités dans tous les monastères sont maintenant entre les mains des africains. Alors que les maisons des congrégations internationales (Saint-Ottilien, Tutzing, Camaldoli) sont bien reliées à d’autres monastères du fait de leur fondement institutionnel, les sœurs diocésaines sont parfois très isolées. En 2008, plusieurs de ces congrégations de la Tanzanie, de l’Afrique du Sud et de la Namibie ont formé une association régionale du nom de Sainte-Mechtilde afin de créer un réseau de soutien mutuel. Plus récemment, la Congrégation pour l’Évangélisation des peuples a mis en place une structure bénédictine d’assistance ecclésiastique pour la congrégation tanzanienne de Sainte-Agnès dans le but de revoir et de renforcer de nombreux aspects de la vie de cette congrégation : Constitutions, formation, leadership, économie, et relation avec les évêques. En cas de succès, cela pourrait bien devenir un modèle pour d’autres congrégations semblables.
« Il est à noter que les bénédictins de Tanzanie ont diffusé le charisme de la vie bénédictine vers les pays voisins. En 1978, l’abbaye de Peramiho est allée fonder au Kenya, et de là en Ouganda. L’abbaye d’Hanga a créé une fondation florissante en Zambie en 1987, et en cette année 2015, l’abbaye de Ndanda a envoyé un groupe de moines par le fleuve Ruvuma afin de commencer un monastère dans le nord du Mozambique. »[3]
Le Nigeria reste bien vivant et tient une place importante dans le développement monastique aujourd’hui.
Dans le contexte du sud de l’Afrique, les fondations de Zambie et de Namibie sont une richesse incontestable. L’association BECOSA regroupe déjà les monastères d’Afrique du Sud, de Namibie, du Zimbabwe, de la Zambie et bientôt aussi du Mozambique. On pourra lire dans ce même numéro du Bulletin de l’AIM, les présentations des congrégations ou monastères données lors de la dernière rencontre des supérieurs de cette association.
2. Fondations et fermetures en Amérique
– Monastères de femmes : Entre 2000 et 2014, il y a eu 12 fondations nouvelles sur le continent américain dont 10 en Amérique Latine : 3 au Brésil, 2 au Mexique, 1 dans chacun des pays suivants : Argentine, Colombie, Équateur, Guatemala, Sainte-Lucie ; et 2 en Amérique du Nord, aux USA. Parmi ces fondations, entre 2010 et 2014, il n’y en a eu qu’une.
Pendant cette même période entre 2000 et 2014, il y a eu 32 fermetures dont 21 aux USA, 6 au Brésil, 3 au Mexique, 1 en Argentine, 1 au Guatemala. Parmi ces fermetures, 3 ont eu lieu entre 2010 et 2014.
– Monastères d’hommes : Entre 2000 et 2014, il y a eu 8 nouvelles fondations, dont aucune entre 2010 et 2014.
Dans la même période, il y a eu 15 fermetures de monastères dont 6 entre 2010 et 2014 (1 en Argentine, 3 aux USA, 1 en Guyane et 1 en Uruguay.)
– En cumulant, les résultats des monastères de femmes et d’hommes sur le continent américain :
il y a eu 20 fondations nouvelles dont 1 entre 2010 et 2014,
et 47 fermetures dont 9 entre 2010 et 2014.
Commentaire
Le nombre des fermetures est largement supérieur à celui des fondations (47/20).
Le plus grand nombre de fermetures se trouve aux USA qui ne connaissent par ailleurs que deux fondations nouvelles. Le Brésil est également assez éprouvé ainsi que le Mexique. Il n’y a aucune fondation ni fermeture au Canada.
On constate dans certains pays une fermeture, mais aussi une fondation, comme en Argentine ou au Guatemala.
« L’Amérique Latine, qui possède déjà une tradition monastique plus ancienne que l’Asie ou l’Afrique, semble se heurter à des difficultés de renouvellement plus important que par le passé.
« Il y avait des maisons bénédictines à Lima et Mexico pendant la période coloniale, mais leur but principal était de recueillir des fonds pour l’abbaye de Montserrat. Il y avait aussi un monastère cistercien indépendant de religieuses à Lima qui a perduré jusque dans les années 1970. Cependant, la première et véritable fondation monastique bénédictine d’Amérique Latine en langue espagnole n’a eu lieu qu’en 1899. La vie bénédictine est donc un phénomène très récent et, pour dire la vérité, il ne fait pas vraiment partie de l’identité nationale au sein des Églises locales, même si quelques abbayes ont atteint récemment une certaine renommée en raison de leurs écoles. Toutefois, même ces monastères sont très fragiles.
« La vie monastique n’est pas très abondante sur le terrain. Il y a relativement peu de communautés bénédictines et celles-ci, pour la plupart, sont petites et souvent très isolées à la fois par rapport aux monastères voisins et au centre de gravité de leur propre maison-mère en congrégation ou de la maison fondatrice. Dans de nombreux cas, il n’y a qu’un monastère dans le pays. Certains monastères ont été fondés avec des membres venant d’Europe ou des États-Unis afin d’ouvrir une école, tandis que d’autres ont été appelés à rendre des services pastoraux ou sociaux ; d’autres encore ont ouvert une maison de retraite pour l’Église locale ou sont devenus un centre spirituel pour la région. Il y a beaucoup d’expressions de la vocation bénédictine, mais le pluralisme est plus marqué dans la région ABECCA (Association Bénédictine Cistercienne des Caraïbes et des Andes) que dans celle de SURCO (la Conférence des communautés monastiques du Cône Sud). Les trois congrégations de sœurs mexicaines en sont un bon exemple.
« Les vocations à la vie monastique dans la région ont stagné de façon spectaculaire au cours des quinze dernières années. On peut constater cela dans le grave déclin de la congrégation du Cono Sur, par exemple, et dans l’état précaire des maisons établies au Mexique, au Venezuela, en Colombie, à Puerto Rico et à Trinidad d’une part, et des fondations plus récentes, telles que celles en Haïti et au Pérou, de l’autre. On ne peut prétendre que tous ces monastères soient florissants, que ce soit pour les moines ou pour les moniales et les sœurs. Les maisons cisterciennes (OCSO) sont un peu mieux loties pour deux raisons : elles ont une idée plus claire de leur identité et appartiennent à un Ordre mieux organisé et centralisé qui offre une forme plus cohérente d’assistance et de gouvernement. Il y a juste une ou deux exceptions bénédictines telle que l’abbaye de Guatapé, en Colombie.
« Un phénomène général est que les candidats à la vie monastique ne se stabilisent pas. Certains monastères semblent florissants avec beaucoup de jeunesse et de vitalité, mais les apparences sont trompeuses. Deux ou trois ans plus tard, les jeunes moines qui forment ces impressionnantes processions et remplissent l’espace de jeunes et joyeuses voix ne sont plus toujours les mêmes. Il y a un pourcentage élevé de membres des communautés qui quittent la vie monastique soit avant soit après les premiers vœux, et cette instabilité touche aussi ceux qui prononcent des vœux solennels. Les formations initiale et continue sont un peu déficientes dans un certain nombre de monastères. Il semble y avoir un manque chronique de moines adaptés à ce travail de formation comme aussi d’administration ainsi que très peu de candidats aptes à être supérieurs. Bien que ces problèmes affectent presque toutes les communautés de la région, les communautés d’hommes semblent être plus fragiles et moins stables que celles des femmes. Les vocations les plus stables viennent généralement des mouvements ecclésiaux tels que l’Opus Dei, le Néo-catéchuménat ou des groupes charismatiques. Il y a aussi une particularité de la vie monastique qui la rend moins attractive aux yeux de nombreux jeunes que d’autres formes de vie religieuse dans l’Église : un monastère ne propose pas à un jeune homme une « carrière » avec les mêmes perspectives que les Ordres actifs et aussi la possibilité d’aider sa famille économiquement. Les femmes sont moins touchées par ce problème.
« Néanmoins, là où il y a de la vie, il y a de l’espoir. Il faut dire que toutes les Églises locales vivent des moments troublés. La société est en train de se déchristianiser et de se séculariser. Par ailleurs, il y a la croissance d’un courant extrême du protestantisme et des Églises et sectes para-chrétiennes. L’Église catholique est moins dominante que par le passé et la culture catholique est moins marquante dans la société. Néanmoins, il y a beaucoup de vie dans l’Église qui ressemble, en Amérique latine et aux Caraïbes, au continent de l’espérance. »[4]
3. Fondations et fermetures en Asie
– Monastères de femmes : Entre 2000 et 2014, il y a eu 48 nouvelles fondations en Asie : 18 en Corée, 16 en Inde, 6 aux Philippines, 3 au Sri Lanka et 2 autres ailleurs, 1 dans chacun des pays suivants : Indonésie, Birmanie, Viêt Nam. Parmi ces fondations, 2 seulement ont été faites entre 2010 et 2014.
Dans la même période, il y a eu 19 fermetures : 8 en Corée, 5 en Inde, 2 au Japon, 1 dans chacun des pays suivants : Chine, Philippines, Taiwan, Sri Lanka. Aucune de ces fermetures n’a eu lieu entre 2010 et 2014.
– Monastères d’hommes : Entre 2000 et 2014, il y a eu 11 nouvelles fondations en Asie, dont 1 entre 2010 et 2014, en Thaïlande. Dans la même période, il n’y a eu aucune fermeture.
– Pour les monastères d’hommes et de femmes :
il y a eu 59 fondations en Asie dont 3 entre 2010 et 2014,
et 19 fermetures dont aucune entre 2010 et 2014.
Commentaire
L’Asie est actuellement le pays où il y a le plus de fondations, mais la proportion de fermetures est élevée.
Si l’on compare avec l’Afrique qui est un autre continent riche en fondations, l’Asie, dans la même période, en a créé dix de plus ; mais il y a eu aussi en Asie, dix fermetures de plus qu’en Afrique. La Corée vient en tête des pays fondateurs.
L’Inde est très vivante, on pourra se reporter au compte rendu qui a été fait dans le Bulletin 107 de l’AIM sur la vie monastique en Inde aujourd’hui.
Les Philippines restent très prospères.
Il est heureux que la vie monastique puisse être présente aussi en Indonésie et récemment en Birmanie et en Thaïlande. Le monastère de Birmanie a été fondé par un groupe de jeunes birmanes formées dans le monastère indien de Shanti Nilayam. Quant à celui de Thaïlande, il est formé de frères venant de Thien An, au Viêt Nam.
4. Fondations et fermetures en Europe
– Monastères de femmes : Dans la période 2000-2014, il y a eu 21 fondations en Europe, dont 7 en Italie, 3 en Ukraine, 2 en Biélorussie, 2 en France, 2 au Royaume-Uni, 1 en Belgique, 1 en Géorgie, 1 en République Tchèque, 1 en Allemagne, 1 au Pays-Bas. Parmi celles-ci, 2 ont été créées entre 2010 et 2014.
Pendant la même période, il y a eu 52 fermetures dont 18 en Italie, 10 en France, 4 en Allemagne, 4 au Royaume-Uni, 4 en Pologne, 3 en Ukraine, 2 en Belgique, 2 en Espagne, 1 au Portugal, 1 en Lituanie, 1 aux Pays-Bas, 1 en Biélorussie, 1 en Roumanie. Parmi celles-ci, 7 ont eu lieu entre 2010 et 2014.
– Monastères d’hommes : Dans la même période, il y a eu 20 fondations de monastères d’hommes dont 1 entre 2010 et 2014 en Italie.
Il y a eu par ailleurs 16 fermetures dont 3 entre 2010 et 2014.
– Pour les monastères de femmes et d’hommes pris ensemble :
il y a donc eu 41 fondations dont 3 seulement entre 2010 et 2014.
Et par ailleurs, il y a eu 68 fermetures dont 18 entre 2010 et 2014.
Commentaire
L’Europe reste donc active, cependant les fermetures, sont plus élevées que sur tous les autres continents. Il est vrai que le continent européen est celui qui comprend le plus de monastères, il est donc logique qu’il soit plus touché par les fermetures.
Comment caractériser les fondations en Europe ? Il y en a bien sûr en Europe de l’Est : six exactement. Mais il y a aussi un grand nombre de fondations en Italie, alors même que c’est le pays d’Europe qui ferme le plus de monastères par ailleurs. Voici les congrégations qui ont fondé dans ce pays : les sœurs bénédictines de Tyburn (Rome), celles de Maria Montevergine (Sta Maria di Castellabate), les sœurs oblates bénédictines de Sainte-Scholastique (San Michele di Serrastreta), les camaldules (Valledacqua), des sœurs de la fédération des moniales d’Italie (Amelia - Terni fondé par Offida), et des sœurs hors congrégation (Saint-Oyen et Fossano fondés par Isola San Giulio).
« Le rapport entre les nouvelles fondations et les fermetures de monastères en Italie est très complexe car il y a beaucoup de monastères historiques avec des communautés très petites et âgées qui sont sur le point de fermer et en même temps, il y a des fondations de petits monastères ou maisons monastiques.
« Le fait que la congrégation cassinaise ait rejoint la congrégation de Subiaco est un bon exemple de cette complexité : les petits monastères de la congrégation cassinaise sont devenus des maisons dépendantes d’autres abbayes, comme le monastère d’Assise qui est désormais dépendant de l’abbaye de Montevergine, ou le monastère de Perugia dépendant de Farfa, ou encore le momastère de Cesena dépendant de l’abbaye de Pontida.
« Quelques monastères de moniales, qui avaient besoin d’aide pour assurer la vie de leur communauté, ont fait venir des sœurs de pays étrangers comme le Nigeria, le Congo-Kinshasa (RDC) ou les Philippines ; mais il y a aussi de nouveaux monastères féminins fondés par des communautés italiennes (cf. ci-dessus). Il est à remarquer aussi que beaucoup de monastères de moniales en Italie ne sont membres ni d’une congrégation, ni d’une fédération mais restent autonomes et sont directement reliées aux évêques locaux.
« Alors que les moines olivétains de Bologne ont fermé, le monastère a été rouvert par des moines de la congrégation brésilienne. D’autres monastères de moines italiens ont commencé des fondations en Afrique et en Asie et reçoivent des moines de pays comme le Congo-Kinshasa (RDC) ou l’Inde.
« Malheureusement, il faut s’attendre dans les années qui viennent à un assez grand nombre de fermetures de monastères avec des communautés âgées et fragiles, car ils n’ont plus de vocations nouvelles depuis une ou deux décennies. Il ne faut pas non plus s’attendre à de nombreuses fondations nouvelles en Italie, tant pour les hommes que pour les femmes.
« Mais une autre question doit être posée : dans ce paysage, quelle peut être la voie juste ? Permettre à des communautés âgées et peu nombreuses d’être jointes à d’autres pour vivre une nouvelle réalité, ou envisager des voies de renouveau, éventuellement en changeant d’emplacement et en abandonnant certaines vieilles structures ? Il n’y a que le temps qui pourra répondre à ce genre de questions. »[5]
En France, il y a eu la fondation d’une communauté des sœurs de Tyburn dans le diocèse de Langres, dans l’Est, et l’ouverture d’un prieuré des Servantes des Pauvres à Meyzieu, dans le diocèse de Lyon.
Il faut retenir de cela que le mouvement des fondations en Europe n’est pas éteint. Il n’est pas loin du nombre des fondations en Afrique. Cependant force est de constater que, comme partout ailleurs, ce mouvement s’est beaucoup ralenti dans les cinq dernières années.
5. Fondations et fermetures en Océanie
– Monastères de femmes : entre 2000 et 2014, il y a eu une fondation en Nouvelle-Zélande.
Et pendant la même période 25 fermetures en Australie.
– Monastères d’hommes : Dans la même période, il n’y a eu aucune fondation et aucune fermeture pour les monastères d’hommes.
Récapitulatif des fondations et des fermetures à travers le monde :
Continents | Fondations | Fermetures de maisons | Total |
Afrique | 49 | 12 | 37 |
Amériques | 20 | 47 | -27 |
Asie | 59 | 19 | 40 |
Europe | 41 | 68 | -27 |
Océanie | 1 | 25 | -24 |
Total | 170 | 171 | -1 |
Commentaire
Pour les monastères de femmes :
– Un grand nombre de ces nouvelles fondations et de ces fermetures concernent des maisons dépendantes liées à une mission et appartenant à une congrégation de sœurs bénédictines.
– Certains monastères abritent une très petite communauté avec des membres âgés et malades.
– Les pays où il y a eu le plus de fondations durant la période de 2000 à 2014 sont la Tanzanie (20), la Corée (18), l’Inde (16), l’Italie (7) et les Philippines (6).
– Les pays où il y a eu le plus de fermetures durant cette période sont l’Australie (25), les USA (21), l’Italie (18), la France (10), la Corée (8), le Brésil (6) et la Pologne (4).
– Des pays ont accueilli pour la première fois une présence de bénédictines : la Zambie, l’Indonésie, la Birmanie.
Pour les monastères d’hommes :
– Depuis l’an 2000, les bénédictins sont présents dans de nouveaux pays : Bangladesh, Bénin, RC, Cuba, Lituanie, Namibie, Slovaquie, Slovénie, Mozambique et Thaïlande.
– Les pays où il y a le plus de fermetures de maisons ou de monastères dans cette période sont : les USA (5), l’Italie (5) ; la France (3), le Brésil (2), le Mexique (2) et le Royaume-Uni (2).
– Comme pour les monastères de femmes, il existe un certain nombre de communautés de petite taille, avec des moines âgés et malades.
– La Chine pourrait devenir à long terme une nouvelle ère pour de nombreuses fondations.
Il faudrait poursuivre ce travail statistique en précisant l’origine géographique et le nombre des vocations, ainsi que la répartition par tranche d’âge dans les communautés.
Conclusion
Dans un monde en pleine évolution, il est assez normal que les monastères connaissent des bouleversements. Cependant, il est assez surprenant de voir qu’un changement très net s’opère dans la dynamique des fondations à partir de 2010 dans tous les continents. Il est difficile ici d’évaluer les raisons d’un tel phénomène. Est-il dû à une baisse des effectifs et à un vieillissement des communautés ? Cela ne vaudrait cependant que pour les USA et l’Europe et pour une moindre part l’Amérique Latine : autant de continents où la vie monastique est implantée depuis plus longtemps qu’en Afrique ou en Asie et donc davantage menacée de vieillissement. Mais dans ces continents-là aussi, le ralentissement des fondations est très net.
Cela tient-il à une crise de la transcendance qui relativise un engagement comme celui de la vie monastique et le rend moins évident à intégrer, créant de ce fait une moins grande vitalité des monastères ?
Cela vient-il encore de la crise financière qui ne permet pas de se lancer facilement dans un lourd investissement sur le long terme en vue d’une fondation ?
Ou bien, les moines ou les moniales sont-ils moins enclins à la difficulté de l’aventure humaine ?
Tous ces éléments peuvent jouer et sans doute d’autres encore. En tout cas, fonder nécessite une vraie détermination et un réel courage, ainsi qu’un lourd engagement pour de nombreuses années. Toutes les communautés ne sont pas prêtes à cela.
Un autre élément semble déterminant : la faculté pour une maison fondatrice de pouvoir fournir un encadrement pour son propre compte et pour celle de la fondation. La question du leadership dans les communautés est de plus en plus difficile à tenir. Il y a eu ces dernières années un grand nombre de nominations de prieurs/es administrateurs/trices du fait de l’impossibilité d’élire un abbé, une abbesse. Mais la difficulté n’est pas moins grande pour les maîtres et maîtresses des novices, les cellérier/es et les différents responsables d’emplois. Cela fait partie de l’évolution des mentalités et de la crise des institutions qui l’accompagne. C’est pourquoi il est si important de proposer des sessions de travail sur cette question et des réunions de formations et d’échanges entre catégories de responsables.
Les ordres cisterciens
Fondations et fermetures dans l’Ordre Cistercien (OCist)
Monastères fermés entre 2000 et 2014
– Au Danemark : Sostrup.
– En Belgique : Colen.
– Aux Pays-Bas : Marienkroon.
Nouvelles fondations
– Nouvelles fondations au Viêt Nam.
– Deux monastères en Californie, fondés par le Viêt Nam :
• Le 13 janvier 2001 : monastère Saint-Joseph (Ɖan Viện Xitô Thán Giuse).
• Le 13 mars 2001 : monastère de la Bienheureuse Vierge-Marie de Châu-Son Sacramento.
– Un monastère en Allemagne, à Nothgott, fondé par le Viêt Nam : Châu-Son. C’est le nom d’une abbaye cistercienne de la province de Lâm Dong, au sud du Viêt Nam. Les moines vietnamiens se sont installés à Rüdesheim en 2013. Depuis la dissolution du monastère d’Eberbach en 1803, c’est la première fois que, grâce à eux, des cisterciens se sont réinstallés dans cette région. Ce nouveau monastère devrait relever l’ancien lieu de pèlerinage de Nothgott (« Miséricorde de Dieu »), dont les origines remontent au XIVe siècle.
Fondations et fermetures dans l’Ordre Cistercien de la Stricte Observance (OCSO)
En 2015, l’Ordre Cistercien de la Stricte Observance compte 3 000 moines et 1 875 moniales répartis en 172 monastères.
Dans cet Ordre, il y a eu entre 2000 et 2014, 13 nouvelles fondations ou incorporations à l’Ordre (6 de moines et 7 de moniales) dont 2 entre 2010 et 2014. Cela concerne les pays suivants : Nigeria (2), Rwanda, Brésil, Nicaragua, Syrie, Macao, Tchéquie (2), Danemark, Espagne.
Il y a eu aussi des fermetures, en particulier entre 2010 et 2014 :
– Belgique
L’abbaye d’Achel a été supprimée au Chapitre général de 2011. La communauté est établie dans une annexe de Westmalle (à Achel également).
– Bosnie-Herzégovine
L’abbaye de Maria Zvijezda, fondée en 1869, est sous le contrôle de la Congrégation pour les Instituts de vie consacrée depuis 2003. Malgré quelques espoirs, il semble vraiment que l’Ordre ne puisse poursuivre la vie régulière à Maria Zvijezda. Le Chapitre général de 2014 a décidé de rechercher une congrégation qui puisse mieux servir la paroisse.
– Angola
Le prieuré de Bela Vista, fondée en 1958, a eu un administrateur apostolique depuis 2010. La communauté a été dispersée depuis le Chapitre général de 2011. Les frères de Bela Vista doivent « transférer leur stabilité », c’est-à-dire renouveler leur vœu de stabilité dans d’autres communautés pour poursuivre leur vie monastique.
Dom Eamon Fitzgerald, l’Abbé général des trappistes, notait ceci dans son intervention au Chapitre général de 2014 (publiée dans le n° 108 du Bulletin de l’AIM) : « Parmi les quarante-huit maisons les plus anciennes de l’Ordre (où apparaît la plus grande part de la fragilité) se trouvent les maisons fondatrices de quatre-vingt-trois autres monastères de moines et de cinquante-quatre de moniales. Cela signifie que le soutien dont une maison fille peut avoir besoin (en termes d’attention pastorale, de formation, de personnel, d’économie) pourrait être mis en danger ».
[1] Cette étude a été réalisée à partir des Catalogues OSB de 2000, 2006, 2014 pour les moniales et les sœurs ; de 2005, 2010, 2015 pour les moines.
[2] La congrégation polonaise (n° 31) n'a pas transmis ses chiffres pour 2014. Elle n'a pas été prise en compte ici. En 2006, elle comptait 138 membres.
[3] Texte rédigé par dom Jeremias Schröder, Abbé-Président de la congrégation de Saint-Ottilien.
[4] Texte de dom Paul Stonham, abbé de Belmont (Royaume-Uni).
[5] Texte de dom Geraldo Gonzalez y Lima